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Nathalie Laforge – 18/12/2024

Soutenance de thèse :

Construction et évolution dirigée de consortia synthétiques mutualistes de Bacillus subtilis

Dans les écosystèmes naturels, les micro-organismes vivent en communautés et interagissent entre eux. En façonnant la composition, la stabilité et la fonctionnalité des écosystèmes, les interactions microbiennes sont des éléments fondamentaux de ces communautés. Cependant, les mécanismes régissant ces interactions restent largement méconnus. Une approche pour étudier de tels mécanismes consiste à concevoir de manière rationnelle des interactions au sein d’organismes modèles. Ce travail vise donc à construire des consortia synthétiques, composés de deux souches de Bacillus subtilismodifiées génétiquement afin d’établir des interactions mutualistes obligatoires, basées sur une alimentation croisée en acides aminés. La démarche adoptée consiste à identifier des consortia viables, caractériser leur croissance ainsi que les dynamiques de populations qui les gouvernent, et renforcer les interactions entre les souches par évolution dirigée.

Deux cribles à haut-débit ont été réalisés afin d’identifier des consortia mutualistes viables. Le premier, réalisé avec 36 souches en plaques de 384 puits, a consisté en une coculture systématique de toutes les combinaisons possibles de souches par paires en milieu minimum. Cela a permis d’identifier les souches capables d’échanger les acides aminés nécessaires à leur croissance. Au total, 37% des cocultures ont accumulé une biomasse supérieure à 25% par rapport à la souche sauvage en monoculture. Une souche représentative de chaque auxotrophie a été sélectionnée pour un second crible en plaques de 96 puits. Les cocultures systématiques des 16 souches sélectionnées ont révélé que 50% des consortia atteignent un taux de croissance d’au moins 50 % de celui de la souche sauvage.

Parmi ces consortia {ΔleuA;ΔpheA}, {ΔargG;ΔmetE}, {ΔlysA;ΔthrC} ont été retenus pour une caractérisation approfondie de leur dynamique de croissance et de leur stabilité. Les cultures successives de ces trois consortia ont atteint jusqu’à 37 générations et se sont avérées stables et reproductibles,avec des taux de croissance de 0,21 h-1, 0,23 h-1 et 0,38 h-1, respectivement. L’analyse par cytométrie de flux des proportions de populations au sein des consortia {ΔleuA;ΔpheA}, {ΔargG;ΔmetE}, {ΔlysA;ΔthrC} a révélé un équilibre stable et spécifique à chaque consortium, avec des ratios respectifs de 80:20, 85:15 et 15:85. L’étude a ensuite été élargie à 10 souches représentatives de chaque auxotrophie en acides aminés, permettant d’observer que chaque consortium atteint un équilibre de population unique, déterminé par les capacités d’échange des membres qui le composent.

Le consortium {ΔlysAthrC} a été soumis à une expérience d’évolution dirigée visant à renforcer la coopération entre les souches. Une culture continue a été réalisée en bioréacteur sur 49 jours, atteignant 380 générations. L’analyse des mutations accumulées chez les variants a permis d’identifier des mutations conduisant à un renforcement des interactions mutualistes, en particulier via l’augmentation des flux d’échange des acides aminés lysine et thréonine.

La construction et l’analyse à haut débit de consortia mutualistes réalisées au cours de ce travail ont permis d’identifier des échanges d’acides aminés permettant la mise en place de consortia stables de B. subtilis sur plusieurs dizaines de générations. Ces résultats constituent une base solide pour l’étude et l’ingénierie de communautés microbiennes plus complexes. Ces approches synthétiques peuvent être utilisées pour explorer les dynamiques des communautés naturelles, et sont applicables à des fins de bioproduction en exploitant la division du travail. L’analyse des proportions de populations et le renforcement des interdépendances métaboliques entre les souches observées en évolution dirigée enrichissent notre compréhension fondamentale des interactions mutualistes et de la manière dont la sélection naturelle peut aboutir à une augmentation de la diversité au sein des communautés microbiennes.

 

Jury members:

  • Muriel COCAIGN-BOUSQUET (INSA Toulouse – TBI) – Rapportrice
  • Fayza DABOUSSI (INSA Toulouse – TWB) – Rapportrice
  • Madeleine BOUZON BLOC (Université Paris Saclay – CEA) – Examinatrice
  • Guillaume CAMBRAY (Université de Montpellier – CNRS) – Examinateur
  • Vincent LIBIS (Université Paris Cité – INSERM) – Examinateur

 

Directed by:

Anne-Gaëlle PLANSON et Matthieu JULES

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